Théâtre : une promesse contraire au résultat

Vents contraires

de Jean-René Lemoine

Image venant du site « Maison de la culture de Bourges« 

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Référence de la pièce – Désenchantée de Mylène Farmer

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La pièce de théâtre se passe à notre époque et nous montre Rodolphe, Marie, Marthe, Leïla, Camille et Salomé. Chaque personne étant relié à un autre d’une manière ou d’une autre :

Marie rompt avec Rodolphe et le vend à Marthe, collègue de travail de notre protagoniste masculin, qui elle-même est la demi-sœur de Camille marié à Leïla. Tandis que Salomé est plutôt en retrait du groupe au début de la pièce.

Salomé commencera à avoir de l’importance au moment où Rodolphe, tiraillé par sa rupture, va louer les services de cette dernière, incluant inéluctablement cette dernière dans ce microcosme. Pour moi, Salomé est une sorte de pierre angulaire de la pièce. Comme dit plus tôt, elle ne fait de base pas parti du microcosme présenté dans cette histoire, mais le hasard (ou le destin ?) va la mettre sur la route de Rodolphe, et plus tard sur la route de Leïla, styliste déchue. La pièce est découpée en plusieurs scénette, rarement longue à part petites exceptions (plusieurs scènes de deux minutes où Salomé se rhabille après une scène de sexe : est-ce réellement utile… ?)

Une mise en scène aux petits oignons

Petit aparté sur la mise en scène qui est le point fort de la pièce : l’arrière-plan de la scène est composé d’une porte pivotante d’un côté noir et de l’autre un miroir. Malgré des coupures frustrantes entre les scènes avec une mise au noir de la salle, les transitions sont très rapides (de mémoire, pas même dix secondes) avec le décor qui peut changer du tout au tout avec de nouveaux éléments sur la scène. J’ai plusieurs fois été impressionné par cette maîtrise dans les changements des éléments de la scène et de la rapidité de ces transitions.

De plus, les jeux de lumières sont magnifiques. À certains moments de la pièce, la lumière prend un rôle très important, et cela fait toujours mouche ! Les miroirs jouant toujours un rôle aussi important grâce aux reflets qu’ils procurent.

La pièce se veut justement être un miroir de la société et traite de sujets comme la pauvreté, l’immigration, la télé, le sexe et plus généralement l’amour mais le fait avec la délicatesse d’un éléphant dans un magasin de porcelaine…

Explication : Les scènes sur ces sujets sont abordées par Marie et Camille (les 2 sœurs qui ont un grain) : « Tiens, Tiens, Tiens… » et ne font que survoler les éléments de surface. Elles citent ces « inégalités » mais n’essaient pas de les expliquer ou d’y trouver une solution.
On pourrait parler de fatalisme mais je n’y vois que de la fainéantise faussement mature. Tels le réalisateur Uwe Boll  qui fait tenir un discours contre le port d’arme à son personnage principal dans le film Rampage, Sniper en liberté mais le glorifie en tant que héros prenant les armes contre une société assez semblable à celle décrite dans Vents contraires… alors que ce n’est ni plus ni moins qu’un terroriste.

Des scénarios entremêlés 

Scénaristiquement parlant, la pièce est un capharnaüm incroyable que je vais tenter de résumé très rapidement :

Marie se lasse de Paris qu’elle trouve triste et de Rodolphe trop attentionné et décide de tout quitter. Marthe, hôtesse de l’air et collègue de travail de Rodolphe, secrètement amoureuse de ce dernier, perd son père fortuné et se retrouve propriétaire d’une richesse énorme. Elle aide Marie à quitter la France pour l’Indonésie en échange de l’homme qu’elle aime, pendant que Rodolphe refusant les approches de l’amoureuse transis (elle se teint les cheveux après avoir appris que celui-ci les préfère les blondes) et se réfugie dans le lit de Salomé.

Pendant ce temps, Marie et Camille vivent aussi une rupture : pour Marie, cela fait beaucoup trop longtemps qu’elles n’ont pas couché ensemble. De plus, Camille a perdu son emploi principal de styliste chez une grande marque suite à un scandale partagé par les médias (cruelle réalité qui n’est malheureusement pas une fiction pour certains). Cette dernière se réfugiant dans une boîte de nuit et tombe sur Salomé dansant « topless » et en tombe amoureuse et souhaite être avec elle et aussi profiter de son corps qui lui rend l’inspiration et l’envie de créer. Salomé accepte ses avances (en échange de conserver sa liberté absolue actuelle, coucher quand elle veut avec qui elle veut, se droguer…) et lui propose de rouvrir une maison de stylisme au nom de « Salomé » et ainsi gagner leur liberté.

Pendant ce temps, Marie meurt dans un accident d’avion et est rejointe dans la mort par Leïla qui avait, pendant la pièce, sombré dans la folie et s’est suicidé à la suite de son internement en hôtel psychiatrique à l’aide de barbituriques.

Rodolphe suite à la mort de Marie rejoint Salomé fait une dernière escapade dans son lit avant de dévoiler le fait qu’il va se marier avec Marthe et refuse les avances de Salomé qui lui avait proposé de trompé leurs conjoint(e) respectif. Du moins, il refuse pour un an…

Tout les personnages sont ensuite réunis (même les morts, oui, oui…) pour fêter le mariage de Marthe et Rodolphe, une pluie de sel les recouvrent clôturant ainsi la pièce.

Une conclusion mitigée

Dit comme ça, je trouve ça plutôt vendeur mais les discours simplistes sur le monde suivis par les scènes de sexe à rallonge et les dialogues dans le même registre et qui sont interminables gâchent réellement la pièce. Je me suis réellement posé la question si ce registre était abordé pour un réel intérêt scénaristique ou juste parler de sexe pour parler de sexe ? Surtout au milieu d’autres sujets comme la mort de migrants clandestins fuyant la guerre et les pauvres tapissant les rues de la France, cela fait un peu tâche et un peu hors sujet… Même discours pour la télé-réalité et la presse people et le name-dropping de marque à foison. Si je devais parier sur le mot le plus présent dans la pièce (si on ne compte pas les déterminants et autres) c’est le mot « IPhone ». A croire que la pièce a été financée par Apple…

De belles promesses non tenues : pauvreté argumentative de l’œuvre, œuvre pessimiste où des gens qui ne représente pas des gens lambda (on est dans un contexte quasiment bourgeois, même pour Leïla et Camille qui vivent sur des réserves de l’ancienne vie de luxe de Leïla) on a juste l’impression qu’ils ne font que se plaindre de choses abstraites, qu’ils/elles ne cherche pas de solutions, que c’est la fin -leur fin, celle de l’humanité ?-, mais à aucun moment il essaie d’agir pour le bien commun, ils reste dans leurs égoïsme et critique celui des autres jusqu’à leur autodestruction !

Thomas Hamilcaro