J’ai choisi d’écrire un article sur l’islamophobie car je suis Français de confession musulmane et j’ai le sentiment que ce phénomène est de plus en plus présent en France. Les évènements de ces dernières semaines suite à l’attentat à la mosquée de Bayonne semblent le confirmer. Ce sujet me tient à cœur. Et pour le traiter, j’ai voulu interroger des responsables d’associations engagés dans des mouvements contre le racisme ainsi que des personnes musulmanes et non musulmanes qui ont toutes en commun d’être Nîmoises.
Dimanche 2 novembre, il y a eu une manifestation en soutien aux Kurdes et contre l’islamophobie organisée sur l’esplanade Charles-de-Gaulle de Nîmes. Une centaine de personnes étaient présentes pour dénoncer les actes anti-musulmans en France. Pour commencer mon enquête, j’ai essayé de contacter la Coordination contre le racisme et l’islamophobie, l’association qui avait organisé cette manifestation pour comprendre avec eux ce phénomène et leur demander comment lutter contre. Malheureusement, personne n’a répondu à mes appels ni messages sur les réseaux sociaux. J’ai ensuite contacté une autre association, la Licra (Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme), qui lutte contre toutes les formes de racisme à l’échelle nationale. J’ai trouvé le contact du représentant de l’association à Nîmes qui m’a demandé d’envoyer un mail qu’il examinerait rapidement. En attendant la réaction des associatifs, j’ai décidé de faire un micro-trottoir autour de l’école pour savoir ce que pense les habitants de Nîmes de l’islamophobie.
L’importance de l’éducation pour lutter contre la discrimination
Dans le quartier des administrations, avenue Jean Jaurès, vers 14h, devant l’arrêt du bus 7, une jeune femme d’une vingtaine d’années attend pour rentrer chez elle. Pour elle, la lutte contre la l’islamophobie passera par l’éducation : « Il faudrait davantage en parler à l’école, dès le plus jeune âge, pour éviter cela. Je pense que ça a commencé il y a quelques années avec les attaques terroristes, les gens ont associé l’Islam au terrorisme. »
Plus bas sur le boulevard, près du lycée Albert Camus, trois jeunes, entre vingt et trente ans sont assis sur un banc et discutent. « Moi je crois que c’est surtout les vieux qui pensent ça », dit le premier. « Moi, j’ai des origines diverses donc forcément, je ne peux pas être raciste. Mais à mon avis, les gens ne voient pas plus loin que le bout de leur nez », estime le second. Puis une jeune femme avec eux dit : « il y a beaucoup de discriminations. L’islam est quelque chose de différent et la différence fait peur aux gens ». En me baladant et en interrogeant les Nîmois, aucune personne ne semblait avoir de problème particulier avec l’islam.
Les médias ont un rôle à jouer
Mais qu’en pensent les musulmans de Nîmes ? Pour le savoir, je me suis rendu à la mosquée de Pissevin, dans le sud de la ville vers 12h30, à l’heure de la prière. Arrivé là-bas, un homme d’une trentaine d’années s’apprête à sortir après la prière, vêtu d’un qamis (un vêtement long traditionnel porté par les hommes musulmans). Pour lui, « c’est à cause des médias que l’islamophobie a pris une place en France car ils ne font qu’en parler à la télé ».
En rentrant à l’école, j’ai continué les recherches en contactant des femmes de mon entourage par téléphone et via les réseaux sociaux, par exemple grâce à l’application Snapchat, très utilisée par les jeunes. « Je ne me sens pas libre de pratiquer ma religion alors que je vis dans un pays qui revendique la liberté, l’égalité, la fraternité, explique Malika, 19 ans. Certaines personnes ne mesurent pas leurs propos ni leurs actions, c’est une forme d’injustice et de non acceptation des différences religieuses et culturelles, c’est une forme de racisme selon moi ». Karima, elle, a 32 ans. Elle souffre beaucoup des amalgames qui sont faits entre l’islam et le terrorisme : « Quand une personne tue, il ne faut pas l’assimiler à l’islam. Dieu interdit de tuer, même un mécréant. Mais après, le problème, c’est que les Français vont dire : regardez c’est ça l’islam, c’est la violence ».
De son côté, Malika, 19 ans, pense que l’islam et les musulmans sont mal représentés dans les médias : « Il faut que ce soit les bonnes personnes qui parlent, les personnes qui connaissent vraiment la religion, et finalement il n’y en a pas beaucoup dans les médias. Il faudrait entendre ceux qui vont à la mosquée tous les vendredis, les gens normaux, qui travaillent ».
Un message de paix et d’amour
Pour lutter contre l’islamophobie, Afida, 48 ans, conseille quant à elle d’appliquer le message de Dieu, un message de paix et d’amour : « Il faut qu’on s’unisse, nous les musulmans, pour leur expliquer ce que Dieu dit réellement et pour que tout le monde comprenne l’islam. On doit être solidaires, s’entraider, c’est marqué dans le Coran ». Après avoir travaillé sur ce sujet, je me rends compte que l’islamophobie est loin de concerner tous les Nîmois, mais le phénomène existe et il faut lutter contre. Il est important d’en parler dans les médias mais surtout de nous rassembler plutôt que de nous diviser.